Thônes, un bourg en mutations. Photos vers 1955-1957

Figure 1 Jardins à Thônes

Fig. 1 Jusqu’à la fin des années 1960, le bourg est entouré de nombreux jardins. Ici, on repère le nouveau cinéma et la partie orientale de Thônes, avant le percement de la rue J.-J. Rousseau (1957) – Fonds A.V.T.

Fig. 2 Vue Générale de Thônes

Fig. 2 Dans les années 1950, la séparation entre le bourg et la campagne est encore marquée. On remarque au premier plan le groupe scolaire (achevé en 1913) et, sur la gauche, le nouveau lotissement des Besseaux – Fonds A.V.T.

Fig. 3 Vue Générale de Thônes

Fig. 3 Thônes avant 1957. Les champs sont encore nombreux et travaillés. Des extensions sont pourtant déjà en cours entre le Nom et le Fier, dans le quartier de la gare et, non visibles ici, vers les Perrasses – Fonds A.V.T.

Le « Château » : Joseph Avet et le collège rénové de Thônes

Les Amis du Val de Thônes vous invitent à leur prochaine causerie, qui aura lieu le vendredi 2 octobre 2020 à 20h00 au 1 rue Blanche à Thônes, dans la salle des « 2 Lachat » située au-dessus de leur local d’exposition.

Elle sera animée par Jean-François Campario, Membre des Amis du Val de Thônes et aura pour thème :
Le « Château » : Joseph Avet et le collège rénové de Thônes, les tribulations d’un grand projet

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Quand la combe de Balme a failli devenir Super-La Clusaz !

À l’heure où les skieurs apprécient les pistes de Balme, dont la réputation n’est plus à faire dans le milieu des snowboardeurs et des skieurs de l’extrême, combien se souviennent qu’un projet de téléphérique avait été lancé à la veille de la Seconde Guerre mondiale, il y a plus de quatre-vingts ans.

En effet, à la veille de celle qui devait être le théâtre de bien des horreurs, un projet de créer des infrastructures dans la combe de Balme est lancé sous le nom de Super-La Clusaz. Revenons donc brièvement sur ce projet qui n’aboutira que bien plus tard et sous une forme différente.

En 1938 une « société civile d’Études du Téléférique [sic] et de la Station Super-La Clusaz » est constituée pour permettre l’aménagement de la combe de Balme, qui était déjà connue des adeptes de la peau de phoque, pour la plupart annéciens, et membres du Club Alpin Français, dont le chalet était à deux encablures de ladite combe.

Vue de la combe de Balme depuis les pentes du Danay.
Remarquez le traineau et les skis en bord de route. Dans les années 1930, de nouveaux espaces s’ouvrent aux skieurs (coll. RB).

En février 1939, le projet est exposé devant le conseil municipal. Cette société d’études demande à la commune de lui louer du terrain pour la construction « d’une gare de départ de Téléférique [sic] aérien avec ses dépendances : tribunes ; parc à voitures ; locaux pour administration ; poste de secours ; logement du personnel ; buffet-H[ô]tel, lieu dit Crêt Braffaz, parcelle 1460 […] ainsi que pour la Gare d’arrivée, lieu dit La Balmaz »¹. Le maire est alors autorisé à conclure un bail avec la société. Des conditions sont posées, comme la durée du bail qui devait prendre effet le 1er janvier 1939 et se terminer le 31 décembre 2037.

Ladite société devait payer une redevance à la commune et lui donner un pourcentage sur le chiffre d’affaires (1% jusqu’à 500 000 francs et 2% à partir de 500 001 francs). Le coût des infrastructures devait être entièrement supporté par la société, même la construction des routes. À l’issue du bail tous les meubles « non meublants » revenaient à la commune. Si le projet n’était pas réalisé dans les deux années, à compter du 1er janvier 1939, il devenait caduc et la commune reprenait ses terrains.

Nous pouvons souligner l’avance de certains aspects du projet avec la création d’un parc à voitures, alors que celles-ci n’étaient pas encore très nombreuses et la réalisation de logements pour les employés, ce qui aujourd’hui manque dans tant de stations !

Le 24 avril 1939, Jean-Baptiste Lansard, maire depuis près de trois décennies, informe son conseil municipal des résultats de « l’enquête sur le bail des terrains nécessaires à la construction et à l’exploitation du téléférique [sic] de La Balmaz ». Quatre-vingt-cinq habitants préconisent un bail de dix-huit ans². Le conseil décide par « 6 voix sur 11 » d’accorder un bail de 18 ans et renouvelable. Cette décision « sauvegardera les intérêts de la commune et ne nuira pas au développement de la station, attendu que le Conseil ne formule nulle opposition à la construction du Téléférique [sic] ». Le projet avait rencontré peu d’opposants, si ce n’est celui qui estimait que « le pâturage communal [allait] devenir périssable »³.

Le rapport du subdivisionnaire des Ponts-et-Chaussées de Thônes, établi le 31 mai 1939, arrive à la préfecture en octobre. Le 2 octobre 1939, l’ingénieur en chef déclare que la réduction du bail « bouleverse complètement l’économie de l’exploitation de la concession, telle qu’elle avait été définie par les conditions posées dans la délibération du 2 février 1939 », mais « l’ouverture des hostilités ne permettra certainement pas à la Société d’Etudes du téléférique de donner une suite immédiate à son projet ».

La guerre mettra un terme définitif à Super-La Clusaz et l’aménagement de la combe de Balme deviendra définitif dans les années soixante, sans téléphérique mais avec une télécabine et ses mythiques « œufs ».

Esther Deloche

Le télé-traineau. Dans les années 1930, la station investit dans des équipements modernes et fonde de grands espoirs sur l’essor du ski (coll. AVT).

Notes :

1 ADHS, 36 W 29. Toutes les citations proviennent de cette série.

2 L’inspecteur en chef rappelle que les signatures n’ont pas été données devant le commissaire enquêteur et la pétition n’a pas valeur de déclaration des 85 habitants.

3 La parcelle 1460 entièrement communale servait de pâturage pour les animaux des exploitants proches.

Thônes et ses arcades au XXe siècle

Les arcades sont apparues après l’incendies de 1453. Depuis, les 24 arches, d’une longueur de 120 mètres, constituent un marqueur fort de l’identité thônaine.

Cependant, elles ont souvent été aménagées, modifiées. Les arcades les plus anciennes sont les plus basses, les plus récentes sont souvent assez hautes.

Commerces et marchés, jeux d’enfants et promenades, équipement urbain comme les fontaines et l’éclairage… Elles sont le témoin des mutations d’un bourg très vivant.

Petit tour d’horizon avec des vues du XXe siècle…

ILLUSTRATIONS : Collection AVT – Sélection par J. D’Odorico.

Histoire de « L’AUBERGE FLEURIE » 5 rue Jean-Jacques Rousseau à Thônes

Cette grande bâtisse jaune clair, située au milieu de la rue de la Saulne, est d’un style altier, genre « art déco primitif », avec un puits de lumière éclairant un magnifique escalier intérieur en bois desservant les 2 étages et les combles. Il y a de grandes hauteurs sous plafond, les pièces sont éclairées par de nombreuses fenêtres hautes et plein cintre, agrémentées de vitrages polychromes en leur partie sommitale. Un grand parc en agrémente les abords. Elle eut de nombreuses affectations et dénominations : Villa Agnellet, Hôtel de la Paix, Auberge Fleurie, École Maternelle et enfin Maison pour quelques associations et le Secours Populaire dans la cour. Retour sur les différentes époques…

Joseph Agnellet (maire de Thônes 1873-1877) fait construire cette grande villa avec son parc, vers 1865 ; elle touchait presque l’angle de celle de son frère François Agnellet (maire de Thônes 1865-1872) qui se trouvait au milieu de l’actuel rond-point de l’auto-école. Cette dernière sera plus tard désignée comme « maison Vacherand », démolie en 1909. Julien (né 1855-mort en 1905) fils dudit Joseph utilisera cette somptueuse demeure, comme domicile, mais sera souvent sur Paris, pour ses affaires ; il était directeur de la manufacture Agnellet frères à Thônes (fabrique de chapeaux). On rappelle que Joseph offrit entre autres, la belle fontaine de la place du Marché. François, Joseph et Parfait avaient fondé la chapellerie de Tronchine, avec des magasins à Paris (et même un au Mexique). Maurice (fils de Julien) habitant Paris puis parti au Maroc, vend en 1913 cet hôtel particulier, à Bernard Veyrat Durebex (1869-1953), fils d’un aubergiste de Manigod, qui fut aussi capitaine des Pompiers de Thônes.

Bernard Veyrat, après 1913, réaffecte et renomme cet édifice « Hôtel de la Paix » avec restaurant et toujours son grand parc. A cette époque il réunit la maison qui est à l’angle Nord-Est du parc, outre l’actuelle rue J-Jacques Rousseau, à ce bien immobilier, ainsi que l’annexe côté ouest contiguë au bâtiment principal. La partie restauration fut tenue par des Baussant puis des Mouthon. En 1923 Bernard Veyrat vend l’hôtel et l’annexe à Charles Gustave, dit Max Linder, suédois, fourreur à Paris.

La famille Linder entreprend de remonter l’hôtel d’un étage, ce qui ne va pas arranger dans le futur, l’état des murs des façades, très lézardées de nos jours. L’établissement se nomme toujours « Hôtel de la Paix », de nombreuses familles de Thônes y font leurs repas de noces. Max Linder semble avoir proposé la gérance à Monsieur et Madame Lantier dès 1944-45, puisque lui-même réside à Genève en 1944. C’est sa fille, épouse Bridel, habitant le canton de Vaud qui vend en 1951 aux Lantier

Le couple Lantier dans les années 50, renomme cet hôtel « Auberge Fleurie » et l’exploite quelques années, avant la revente à la Commune de Thônes en 1953.

Dès lors la Commune réaménage le bâtiment pour accueillir des colonies de vacances. Puis en 1955, elle décide de nouveaux travaux pour installer l’école maternelle qui vient de quitter la rue Blanche. De ce fait, il faut détruire un bâtiment étroit, tampon entre l’annexe et l’ancien hôtel, pour laisser un cheminement de sécurité joignant l’arrière de l’édifice, à la rue de la Saulne, coupant ainsi la continuité des façades de cette rue de la Saulne. En 1957, une partie du parc est cédée pour le passage d’une nouvelle rue rejoignant les Addebouts à la Tannerie Collomb, allongeant ainsi la rue de la Charrette : c’est l’actuelle rue Jean Jacques Rousseau, réalisée sous le mandat du maire Marcel Vulliet.

Une nouvelle école maternelle est construite en 1977,dans les anciens jardins du groupe Thurin (École primaire de la Curiaz) ; elle remplacera celle de l’ancienne Auberge Fleurie, qui perdura jusqu’au début des années 2000. De nos jours, les étages supérieurs abritent désormais 3 logements sociaux. Les autres locaux sont occupés par des Associations et le bureau des Gardes forestiers. L’ancienne salle de sport dans la cour est utilisée par le Secours Populaire.

Ph. SALIGER-HUDRY et J.-F. CAMPARIO, pour les Amis du Val de Thônes.

Illustrations : Collection Amis du Val de Thônes

Le patronyme Perrillat du Grand-Bornand

Philippe Saliger-Hudry nous explique les différentes branches du célèbre nom PERRILLAT du Grand-Bornand : cliquez-ici pour lire l’article

Pour en savoir plus vous pouvez vous reporter à l’ouvrage de Laurent Perrillat auteur du n° 29 de notre collection.

Souvenirs d’un corbillard chouchouté par ses concitoyens

En 1962, Eugène VULLIET, fabriquant des cercueils comme quelques collègues menuisiers, investit dans l’achat d’un véhicule corbillard motorisé et monte sa société de pompes funèbres. C’est la fin d’une époque.

Jadis les enterrements avaient lieu dans l’église pour les officiers du culte, et dans le cimetière entourant l’église pour les paroissiens. A partir de 1794, des règles d’hygiène ayant été instituées, un cimetière séparé fut construit à l’arrière de la rue des Clefs, et la première personne qui y fut inhumée s’appelait Etiennette SONNIER née GOLLIET. Le transport se faisait à bout de bras depuis l’église, puis vint l’utilisation du char à bras jusqu’à ce que le corbillard tiré par un cheval ne débarque en guise de modernité. Le dernier « pilote » fut Alexandre FAVRE, dit Sandre CROZET.

Petite particularité thônaine liée à la conformation des lieux : le corbillard ne pouvait passer que rue des Clefs à cause de la présence de la voûte sur l’accès arrière du cimetière ; mais sur cette rue, le convoi funéraire devait s’arrêter devant la grande porte de l’ancien collège, elle aussi trop basse, afin que le corps soit à nouveau porté à bouts de bras ; la cour du collège traversée, le cortège pouvait enfin passer sous un grand préau et accéder au cimetière. Cela amusait beaucoup les élèves, en récréation ou aux fenêtres ! Cela dura jusqu’à la démolition du collège vers 1935.

Vue de la façade arrière de l’ancien collège, avec sa porte cochère trop basse pour le corbillard

Lorsque l’on cherche des renseignements dans les délibérations des anciens conseils municipaux, on ne trouve que peu de détails, ces réunions étant des chambres d’enregistrement suite au travail (non archivé) en commissions ; en revanche, les règles de fonctionnement du corbillard, certes outil de toute première importance, s’étalent sur plus d’une page du grand livre, suite à une remise à neuf complète pilotée par la commune en septembre 1932.

Le devis proposé par Monsieur Jean FOURNIER, ferronnier, fut approuvé à l’unanimité ; le montant était de 1757 Francs, dont 680 Francs pour les 4 baldaquins et 500 Francs pour la peinture « de luxe ».
Voilà les consignes instaurées par le conseil municipal à l’occasion de cette réfection :

Le corbillard équipé de ses panaches (1) et de ses lambrequins (2)

1) Les conseillers de chaque section signaleront les arbres placés en bordure des chemins publics dont les branches gênent le passage du corbillard ; les propriétaires de ces arbres seront mis en demeure par le garde champêtre de procéder à un élagage sous peine de remboursement à la commune des frais engagés à l’exécution du travail.
2) Il y aura lieu de ne pas sortir ou de tenir à l’abri le corbillard jusqu’au jour d’une sépulture.
3) Monsieur FOURNIER, adjoint, concevra un caisson en bois afin de protéger les panaches (1). Ceux-ci ne seront arborés qu’à l’entrée de la ville. Il sera également chargé de faire installer dans le hangar du corbillard un placard avec penderie afin de remiser à l’abri des poussières les lambrequins (2) et autres garnitures en étoffe.
4) Le cantonnier de la section ville est chargé du bon entretien du corbillard. Après chaque usage, il fera sécher, brossera et rangera dans le placard ad hoc toutes les garnitures en étoffe ; il enlèvera soigneusement avec une éponge humide toutes les traces de poussière ou de boue existant sur la carrosserie. Pour cette tâche, il sera rémunéré de 5 francs par sortie du corbillard dans la commune.

Quel sérieux, quelle précision, et quel respect collectif pour les familles endeuillées !

Jacques VULLIET

Le corbillard, au musée d’arts et traditions populaires du Val-d’Arly, à Ugine

(1) Panache : assemblage décoratif de plumes flottantes. Sorte de flambeau disposé en haut et de chaque côté du corbillard,
(2) Lambrequins : étoffes pendantes et découpées en festons, souvent ornées de franges et de glands, qui décorent les ciels de lits. Il existe des lambrequins de toile, de velours ; des lambrequins à franges et à glands…

Sources :
-Revues AVT N° 13 & 19 (Y. Angelloz, M.F. Emerich & A. Veyrat – Abbé G. Accambray)
-C.R. conseil municipal du 25.09.1932
Histoire de Thônes par le Chanoine Pochat Baron.